Critique 300 : La naissance d'un empire [2014]

Avis critique rédigé par Richard B. le mercredi 5 mars 2014 à 15h35

Sur les traces de Leonidas.

Alors qu'il se préparait à son dernier combat face à l'armée de Xerxes, le roi Leonidas avait exprimé à Dilios une ultime requête : « Tu transmettras mes tous derniers ordres au conseil avec force et verve. Raconte-leur notre histoire. Que tous les Grecs sachent ce qui s’est passé ici. Tu auras un beau récit à leur faire. Celui d'une victoire. » 1 an après cette ultime bataille, qui entraîna la mort de Leonidas et de son armée, ce même Dilios pouvait dorénavant guider une gigantesque armée pour combattre les Perses et exprimer avant l’affrontement une dernière harangue qui ne manquait pas de fougue : « Là-bas ils savent bien quelles épouvantables souffrances leur ont infligés les coups de glaives et de lances des 300. Or qu'ils voient maintenant  à travers la plaine 10 000 spartiates marchant à la tête de 30 000 Grecs libres ».

Lorsqu'une suite à 300 fut annoncée, une bonne partie du public était donc en droit d'espérer une réelle suite avec un Dilios menant ses guerriers dans une confrontation dantesque. Mais il est vrai aussi que le chiffre "300" n'aurait plus trop eu la moindre valeur en terme de titre et qu'il aurait peut-être fallu à la production de revoir le titre. Du coup, on nous fait à la place une sorte de redite sauf qu'il ne s'agit plus de spartiates, mais d'une armée de "simples " Grecs devant faire face à la sœurette de Xerxes pendant que celui-ci mène le combat face à Leonidas. Nous assistons donc à une bataille se déroulant dans un contexte quasi similaire, excepté qu'il y a ici un avant qui vient nous expliquer les origines de Xerxes et un après...


Cette fois-ci nous suivons donc le général grec Thémistocle, qui ambitionne de réunir tous les Grecs - spartiates compris - pour venir à bout des redoutables Perses. Mais voilà, il n’est guère facile de rassembler tout le monde puis, comme le temps est fortement compté et que le roi Leonidas est lui-même déjà en partance pour affronter l'armée de Xerxes, Thémistocle décide lui aussi d'attrouper quelques hommes afin de ralentir l'ennemi, du moins le temps que tout ce beau monde décide enfin de s'allier.

Comme évoqué plus haut, l’époque des "très méchants" est finie ; il est temps dans cette suite de donner une motivation de vengeance à Xerxes, et surtout que ses troupes révèlent un peu plus un visage humain. Finis le temps des Perses affreux et déformés s'apparentant plus à des monstres qu’à des humains. Le premier opus ayant subis quelques controverses à ce propos, la production semble en conséquence avoir tenté ici d'arrondir les angles en y apportant de petites modifications afin que les choses paraissent plus acceptables. Même la sœurette, Artemisia (Eva Green), décrite comme encore plus tyrannique, a un background pour expliquer sa cruauté, et les scénaristes (qui sont pourtant toujours Zack Snyder et Kurt Johnstad) s'amusent à faire que cette dernière en pince un peu pour son adversaire, ce qui conduira d'ailleurs à une séquence de baise complément grotesque et risible qui aura pour seul avantage de dévoiler la charmante poitrine de la dame. Dans la même lignée, on se questionnera sur le fait qu'en 2006 on nous expliquait que seuls les hommes combattaient, les femmes étant alors cantonnées, dans la première adaptation de l'œuvre de Miller, soit dans le domaine de la politique, soit dans le beau métier de courtisane. Le spectateur se rappellera ainsi de la reine Gorgo (Lena Headey) essayant de convaincre le conseil d'envoyer des guerriers prêter main forte à Leonidas, alors que désormais - afin de montrer des femmes plus dans l'air du temps - Zack Snyder et Kurt Johnstad nous présentent des dames encore plus redoutables que n'importe quel homme, à l’image du personnage d'Eva Green. Quant à la reine Gorgo, elle passe de politicarde discourant face au conseil pour amener d'autres à se battre, à réfractaire au combat tout en se transformant entre temps en une farouche guerrière.

Trop occupé à jouer avec les aventures de Superman & co, ou conscient que cela pouvait peut-être ternir quelque peu son image de réalisateur, Zack Snyder se contente d'un titre de producteur et scénariste, laissant la réalisation à l'inconnu Noam Murro (Smart People), qui tente de reprendre plus ou moins avec bonheur le même univers. Car si la direction de Snyder faisait de chaque image un véritable tableau artistique et que chaque mouvement de caméra était d’une parfaite lisibilité, Noam Murro abuse des effets de caméra quitte à ce qu’on soit parfois quelque peu perdu dans l'action. Et si on a encore quelques jolies conceptions graphiques (le plus souvent déjà aperçues dans la bande-annonce), à d'autres moments on est dans le brouillon numérique, impression accentuée du fait qu'on s'ennuie et qu'on cherche plus à faire attention à l'image qu'à l'histoire et aux personnages desquels on se fout éperdument. Car c'est encore le souci de cette préquel/séquelle/suite : on connait déjà les tenants et aboutissant, d’autant plus que Sullivan Stapleton n'a semble-t-il pas la carrure pour porter le film sur ses épaules. Quant aux acteurs qui reviennent, ils ont un temps de présence à l'écran minimaliste, de même que leur prestation bien inférieure à celle qu'ils nous avaient gratifiée la première fois. Au final, on retiendra donc surtout Eva Green (oui j'en parle beaucoup décidément) qui aura le mérite d'être la seule à apporter un peu de vie et de peps à un film qui en manque cruellement.

La conclusion de à propos du Film : 300 : La naissance d'un empire [2014]

Auteur Richard B.
40

Alors que le premier 300 était créatif, politiquement incorrect (les Perses étaient représentés comme des monstres, tant dans le fond que dans la forme), que chaque image ressemblait à un tableau, cette suite ne fait que reprendre les mêmes éléments, en arrondissant un peu trop les angles pour ne pas ressusciter la polémique autour du premier. Ce "300 - La Naissance d'un empire" est de plus graphiquement inférieur, tombant même parfois dans le brouillon illisible. Si l’on ajoute à cela une histoire pas très cohérente qui tente de se coller au film original, autant dire que le résultat fait plus que décevoir. Réservé aux moins indulgents ou aux fans qui sont prêts à de fortes concessions.

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