Critique L'étoile de Pandore #1 [2005]
Avis critique rédigé par Nicolas L. le mercredi 19 octobre 2011 à 19h24
Seconde Chance… Ultime Frontière ?
Comme la bête chargeait, des étincelles bleues et violettes jaillirent de sous les sabots. L’air empestait le métal brulé. Tour autour de lui, des cavaliers du clan étaient transformés en comètes vivantes, tandis que les projectiles frappaient et se brisaient sur leurs boucliers. Les chevaux hurlaient et s’effondraient sur le sol. Sur leurs flancs s’ouvraient des blessures béantes d’où sourdait un sang épais.
Des missiles passèrent au dessus de leurs têtes...
Quand Dudley Bose, humble professeur d’astronomie de la petite université provinciale de Gralmond, détecte sur ses senseurs l’enveloppement de l’étoile Dyson Alpha, il ne se doute pas que sa découverte va non seulement faire de lui l’une des personnalités les plus célèbres du Commonwealth, mais semer le trouble jusque dans les plus hautes sphères politiques. Intrigué par ce phénomène inexplicable, le gouvernement décide d’aller y voir de plus près et met sur pied une mission d’exploration spatiale. Cependant, depuis la découverte et l’exploitation des trous de ver, plus personne ne maitrise aujourd’hui ces antiques techniques de navigation intersidérales. Pour diriger cette opération, il leur faut donc trouver un vétéran, quelqu’un qui a participé aux vieux programmes de conquête spatiale mis en place par la NASA au cours du 21eme siècle. Heureusement, en 2380, la mort et la vieillesse sont des maux appartenant au passé, et cet homme, ils vont le trouver en Wilson Kime, premier humain à avoir posé le pied sur Mars.
A l’annonce d’un tel projet, il est bon de noter que tout le monde ne partage pas l’enthousiasme populaire. Parmi les réfractaires, les plus virulents sont, sans nul doute, les Gardiens de l’individualité. Ce groupe de puissants activistes extrémistes est persuadé que le Commonwealth est perverti par l’Arpenteur, une entité maléfique extraterrestre. Pour eux, briser l’enveloppement de Dyson Alpha équivaudrait à ouvrir la boîte de Pandore. Les services spéciaux du CICG, dirigés par Paula Myo et son adjoint Hoshe Finn, se voient donc confier par les hautes instances la lourde tache d’aider à la mise en forme du projet en traquant ces fanatiques, qui comptent parmi eux le tristement célèbre terroriste Adam Elvin. Des investigations et des missions de surveillance qui vont amener le duo de détectives à ressortir de vieux dossiers oubliés et faire de bien étranges découvertes. Puis, enfin, il y a les extraterrestres. Nul ne sait ce que les Silvens, les Raiels et l’Ange des Hauteurs pensent de ce fameux enveloppement de Dyson Alpha. C’est ce que l’excentrique Ozzie Fernandez Isaac, co-inventeur de la technologie des trous de ver, va essayer de découvrir...
Premier tome de la quadrilogie composant la Saga du Commonwealth, Pandore abusée est un roman choral exploitant un grand nombre de personnages au sein d’un univers de Space Opéra high tech où l’humanité a découvert les secret de la vie éternelle, à travers des séries de cures de rajeunissement et, dans le cas d’un décès accidentel, les transferts de mémoire dans des corps clonés. En plus de développer une intrigue très aventureuse, dans la plus pure tradition du genre, l’auteur Peter F. Hamilton introduit donc dans son discours des aspects cyberpunk et hard science qui lèvent quelques très intéressants questionnements d’ordre éthiques et philosophiques. Dans ce roman, l’écrivain britannique nous décrit une société certes pacifique (car tuer est devenu un concept presque obsolète) et confortable mais composée d’individualités blasées, exploitant une échelle de valeurs sociales qui est presque exclusivement basée sur la plastique et l’épaisseur du portefeuille. Au sein du Commonwealth, l’humain du 24eme siècle est un hédoniste qui pense trouver le bonheur en multipliant les partenaires sexuels (le mariage est considéré comme une gentille coquetterie passagère) mais qui a carrément oublié ce qu’était réellement l’amour et l’amitié. Avec la disparition de la mort, la vie est passée du statut de don divin à celui de simple banalité. Peter F. Hamilton nous invite à réfléchir sur le sujet.
L’écheveau de poutrelles se fit encore plus dense. Wilson demande à son assistant virtuel de se connecter à l’ordinateur de la plate-forme d’assemblage. Ce dernier superposa à son champ de vision un plan transparent du vaisseau. Celui-ci était en fait d’une conception assez simple. La section qui accueillerait l’équipage était un anneau de trois cent mètres de diamètre, dont le mouvement de rotation générerait une gravité équivalente à vingt pour cent de la gravité terrestre. Une roue de von Braun on ne peut plus basique, pensa-t-il, même s’il ne viendrait à l’idée de personne de l’appeler ainsi aujourd’hui. Au centre de cette roue, un cylindre de quatre cent mètres de long et cent cinquante mètres de diamètre, contenant à la fois l’hyperréacteur et les fusées à plasma, et dont la surface était couverte d’excroissances métalliques pareilles à des tumeurs mécaniques.
Pour ce qui est du choix de traitement, le moins que l’on puisse dire, c’est que Peter F. Hamilton prend tout son temps dans la mise en place de l’intrigue principale. En fait, le Seconde Chance ne quitte sa base de lancement, à destination de Dyson Alpha, qu’en toute fin de tome (pour une dernière partie absolument géniale). Mais cela ne veut pas pour autant dire qu’il ne se passe rien dans les 500 premières pages. Bien au contraire! Pandore Abusée est riche en sous-intrigues, spectaculaires ou énigmatiques, qui donne au roman une épaisseur digne des meilleures fresques littéraires. Aucun personnage, ayant un tant soit peu d’importance, n’est négligé et chacun d’entre eux, finement dessiné, nous embarque dans une histoire originale, qui amène une belle diversité à cet univers coloré (l’enquête policière de Paula Myo, le combat épique de Kazimir McFoster, l’aventure exotique d’Ozzie, le thriller d’espionnage avec Adam Alvin, etc.), et le tout nous est narré à grands renforts de détails techniques qui apportent un grand réalisme au récit. Bref, en lisant ce qui peut être considéré comme une longue mise en place, chaque lecteur pourra identifier son (ou ses) personnages favoris.
Malgré tout, force est de dire que ce choix de traitement ne va pas faire l’unanimité. C’est certain, Peter F. Hamilton connait ses détracteurs, qui ne manquent pas d’avancer que l’auteur fait trop souvent dans la digression, qu’il perd le fil du récit, qu’il trahit l’esprit du space opera, qu’il se complait également dans l’abus de «technologisme» pédant, qu’il verse dans la philosophie de comptoir. Bref, tout positionnement, à partir du moment où il est argumenté en toute bonne fois, est respectable et cela veut simplement dire que ce type de roman n’est pas fait pour tous les lectorats. Les amateurs de récits SF riches et diversifiés, qui apprécient autant le grand spectacle que l’investigation, seront, quand à eux, pleinement comblés... et impatients de découvrir la suite!
La conclusion de Nicolas L. à propos du Roman : L'étoile de Pandore #1 [2005]
Avec Pandore Abusée, premier volet d’une grande saga SF, Peter F. Hamilton nous propose un récit très riche et bien structuré, qui brasse sans complexe divers genres et éléments narratifs. Il en résulte un style et un univers que certains pourront trouver indigeste et fourre-tout mais qui ravira tous les amateurs de romans chorals et tous les fans de SF intelligente (en lisant du Hamilton, on pense souvent à Heinlein), qui se délecteront d’une histoire mêlant investigations policières, exploration spatiale, terrorisme international et combats épiques.
On a aimé
- Un univers riche et varié
- Un roman choral aux personnages intéressants
- Une intrigue bien ficelée
- Une dernière partie prometteuse
On a moins bien aimé
- Une longue mise en place
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