Critique Dungeon Twister 2 - Prison [2009]
Avis critique rédigé par Benoît F. le mardi 23 novembre 2010 à 13h03
TWIST AGAIN
La première version de Dungeon Twister vit le jour en l’an de grâce 2004. Le succès fut immédiat et une armée de fidèles se constitua peu à peu, prête à affronter les frasques de l’Archimage. Jadis édité et distribué par Asmodée, le jeu connut moultes extensions et de nombreux tournois s’organisèrent de par le monde.
2009, Christophe Boelinger, auteur du premier opus, décide de rééditer son enfant chéri. C’est ainsi que naquit Dungeon Twister Prison, plus communément appelé DT2.
Dungeon Twister: crus 2004 et 2009
BIG BROTHER IS WATCHING YOU
Sur la planète Targane, tout le monde est sympa ! Les nains aimant les elfes, les trolls font du shopping et les dragons se font tranquillement payer leur retraite, se dorant le jabot aux abords d’un volcan. Cette image ô combien idyllique, et ne correspondant pas à la réalité de ce monde, fut bouleversée par l’arrivée d’un être à la puissance quasi-divine. Désormais, Targane était sous la coupe de cette entité omnipotente dénommée l’Archimage. Ce joyeux drille, détenteur du secret de l’immortalité, entreprit d’assoir sa domination en ordonnant la construction de châteaux et de places fortes disséminés à travers le monde. Au fil des millénaires, son royaume ne cessa de grandir, mais le gaillard songea qu’il était temps de passer à autre chose de plus…ludique. Le fieffé gredin recruta les ouvriers les plus talentueux afin d’aménager ses forteresses en labyrinthes souterrains envahis par la vapeur et le vacarme obsédant des rouages mécaniques.
L’Archimage mit en place un réseau de boules de cristal au sein de ces constructions labyrinthiques : la surveillance vidéo était née, mais que fait la C.N.I.L ! En effet, cet hybride improbable de David Copperfield et d’Endemol décida de téléporter de pauvres créatures au sein de ses constructions infernales. Le credo de ces malheureux se résuma en quelques mots : survivre et trouver une issue, tout cela sous le regard malsain de l’Archimage.
Mais au fil du temps, certains de ces labyrinthes furent oubliés par leur puissant propriétaire. Ainsi, cinq siècle plus tard, l’une de ces constructions perdue dans les montagnes d’Allen-Ghar, fut investie par les nains qui, guidés par leur sens pratique, la transformèrent en prison. Les plus terribles crapules de Targane étant enfermées dans cet édifice, la prison d’Allen-Ghar devint rapidement et tristement célèbre. Cette réputation parvint aux oreilles de l’ancien propriétaire des lieux. L’Archimage, irrité par l’arrogance naine, décida de punir ces derniers en décimant la moitié des clans de la région. La trêve hivernale passée, car même un puissant archimage ne peut expulser son monde durant cette période, la plupart des créatures du coin décidèrent de fuir cette contrée devenue bien trop dangereuse. La renommée de la prison n’avait pas échappé à l’Archimage qui décida de rouvrir les portes de ce formidable parc d’attraction.
DELUXE VERSION
Pour cette réédition, on peut dire que l’auteur-éditeur a gâté son monde. La boîte change littéralement de format et présente un facing attirant forcément l’œil du bon vieux fan d’Heroic Fantasy. Le thermoformage permettra d’accueillir la totalité du matériel et, en sus, celui des extensions déjà parues pour la version précédente. En effet, l’ancienne et la nouvelle édition sont entièrement compatibles. Donc, si vous êtes un fidèle de la gamme, inutile de revendre vos extensions sur un quelconque site de vente aux enchères. Gardez les précieusement.
Esthétiquement parlant, le jeu est abouti et les illustrations ne manqueront pas de satisfaire les adeptes de la première édition tout comme les petits nouveaux attirés par l’image d’un colosse désireux de transformer un homme-serpent en sac à main. L’ajout notable de cette version réside dans la présence de figurines représentant les belligérants. Là encore, la gravure est de haute volée et cela grâce à la patte de l’équipe Zibobiz qui avait déjà apporté tout son savoir-faire sur Claustrophobia. On remarquera l’imposante et non moins discrète figurine du colosse qui rappellera, aux amateurs de Comics, le personnage de Piotr Nikolaievitch Rasputin alias Colossus des X-Men.
Eat this!
Les deux séries de huit figurines sont déclinées en deux couleurs afin de différencier les équipes. De même, on retrouve deux paravents répertoriant les capacités des personnages, huit tuiles servant à constituer le plateau de jeu ainsi que de nombreux pions en carton et cartes (Action, Combat, Saut). L’ensemble du matériel est de très bonne qualité.
L'ensemble du matériel
Du point de vue de la présentation des règles de jeu, deux livrets se partagent la tâche. L’un est consacré aux règles du jeu de base rédigées sous forme de tutorial pour un apprentissage en douceur à destination des petits nouveaux. Les joueurs aguerris passeront rapidement sur cette étape initiatique, le cœur des règles n’ayant pas connu de profonds bouleversements entre les deux éditions. Le second livret est dévolu à la version solo et dans une infime partie, aux variantes pour vétérans. Ces règles vouées au jeu en solitaire (tout seul dans son antre de geek) sont le second apport conséquent de cette nouvelle mouture.
Concernant l’ergonomie des éléments de jeu, la présente édition souffre de problèmes de lisibilité liés à la présence des figurines. Malgré leur qualité esthétique, ces dernières auront tendance à encombrer des tuiles de jeu regorgeant d’informations en tout genre, elles mêmes noyées sous un déluge de détails graphiques visuellement réussis mais chargeant sensiblement l’ensemble. De même, la rotation des tuiles s’avérera délicate et provoquera le déséquilibre constant des pions et des figurines présentes. Ces soucis d’ergonomie auront tendance à disparaître à force de pratique. A la décharge de l’éditeur, il s’avère difficile de résoudre le problème posé par l’effet de rotation des tuiles, à moins de proposer des plateaux tournants au risque d’augmenter grandement le coût du jeu.
PRISON BREAK
Le but du jeu est d’accumuler cinq points de victoire avant que votre adversaire n’ait réalisé qu’il devait faire la même chose. Pour cela, il existe deux moyens : faire sortir vos figurines du labyrinthe ou/et éliminer les combattants ennemis. Chacune de ces conditions rapportent un point de victoire.
Les tuiles composant le plateau de jeu
Les mécanismes de jeu reposent sur l’emploi d’un système de point d’actions. A chaque tour, le joueur actif doit résoudre les trois phases suivantes :
- Jouer une carte Action. Celle-ci indique le nombre de points d’action (P.A) utilisables pendant le tour.
- Dépenser ces points d’actions sachant que pour 1 P.A vous pouvez révéler une salle, activer la rotation d’une salle, déplacer un personnage ou engager un combat.
- Récupérer ses cartes Action si elles ont toutes été jouées.
Les combats se résolvent très simplement et sans hasard (mis à part l’inconnu dans l’équation que représente le cerveau retord de votre adversaire). Lors d’un affrontement, chaque participant joue une carte Combat face cachée. Celui qui cumule le total le plus important, en additionnant la valeur de sa carte et la force de combat du personnage, remporte le duel. Sur une première attaque victorieuse, la victime est blessée ; sur la seconde, elle est éliminée.
Le système de jeu paraît donc simple, et il l’est, mais c’est sans compter sur les pouvoirs des personnages et les effets des objets que vos « survivors » seront amenés à récupérer. Ajoutez à cela le principe de rotation des salles et vous obtenez un jeu tactiquement riche reposant sur des règles relativement accessibles.
LE POINT DE VUE DE LA BLEUSAILLE
N’étant pas un aficionado de la série Dungeon Twister, le propos suivant tentera d’exposer la vision d’un joueur faisant ses premières armes dans cet univers via la nouvelle mouture du jeu de Christophe Boelinger.
Tout d’abord, on notera le souci esthétique apporté à cette édition. Nul doute que les figurines attiseront la curiosité d’un certain nombre de joueurs malgré les problèmes de lisibilité que cela entraînera en cours de partie. En effet, il ne sera pas toujours aisé de discerner les éléments représentés sur les salles. De même, la rotation des tuiles s’avérera délicate lors de leur manipulation. Pour résumé, Dungeon Twister Prison jouit d’un beau matériel qui se révèle au final peu pratique.
Concernant les règles, cette version s’illustre par la présence d’un tutorial de cinq scénarios. Un atout particulièrement à propos pour qui veut pénétrer en douceur la sphère, souvent vue comme hermétique, des joueurs de Dungeon Twister. Effectivement, sous ses atours thématiques, le jeu de Christophe Boelinger présente de nombreux points communs avec des jeux plus abstraits. Handicaps et parties en temps limité viennent renforcer cette idée même s’il s’agit de variantes proposées aux vétérans. De même, il sera difficile pour un novice de s’imposer face à un vieux de la vieille. En cela, la nouvelle version de Dungeon Twister ne déroge pas à la règle. Malgré un tutorial relativement bien conçu, il faudra du temps avant de pouvoir maîtriser un jeu d’une telle richesse.
Autre apport de poids de Dungeon Twister Prison : les règles solo. En effet, cette version propose un véritable système de jeu en solitaire. Bien évidemment, rien ne vaut l’adversaire humain dans la pratique d’un tel jeu. Cependant, ces règles solo semblent avoir bénéficié de toute l’attention de l’auteur et imposent le respect tant elles paraissent « huilées » à la perfection. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si une large partie du matériel y est consacrée. Les novices devenus accrocs pourront donc s’entraîner à loisir grâce à ce système de jeu en solitaire tout en gardant à l’esprit que l’agressivité de la bête humaine n’est sans doute pas celle d’un bout de carton ou de plastique.
Le télépathe dit Gueule d'amour
A ce propos, Dungeon Twister Prison s’illustre par l’omniprésence des combats. La plupart des personnages possédant des pouvoirs dédiés à l’attaque, il sera difficile d’éviter quelques tapes amicales distillées par le colosse. De même, les capacités du télépathe et de la traitresse orienteront inéluctablement votre stratégie vers la voie de l’affrontement. Les objets auront également tendance à imposer cette option aussi belliqueuse soit-elle : lance télescopique, arc, bouclier et bâton de boule de feu ; quel bel arsenal à votre disposition !
LE POINT DE VUE DU VETERAN
Pour faire suite à l'avis d’un novice en la matière, voici l’opinion d’un fan de la première heure sur Dungeon Twister Prison. Merci à Jean-Christophe pour cette intervention permettant de mettre en parallèle deux points de vue différents sur un jeu qui possèdent ces fans et ces détracteurs.
« Tout d'abord je précise que je suis un fan de DT, j'ai toutes les extensions de la première édition. J'attendais donc Prison plus comme une extension que comme une nouvelle édition. A ce titre, j'ai été ravi par les nouveaux personnages (même si sur huit, cinq sont originaux), les nouveaux objets et les nouvelles salles : cela apporte du nouveau sur le plan stratégique.
Par contre le prix est plus élevé que pour une extension classique, cela s'explique par le matériel (nouvelles cartes Combat et présence de figurines). Cependant, j'aurais préféré une extension « classique »: j'aurais eu huit nouveaux personnages (au lieu de cinq) et je n'avais pas réellement besoin de nouvelles cartes. Les figurines sont certes belles mais pas très pratiques: elles gênent la vue, on peut facilement oublier un objet ou un blessé sous la figurine et en plus, si elles ne sont pas peintes, les caractéristiques des personnages sont illisibles. Bon, après on peut se dire que ces erreurs ajoutent du piment (j'ai déjà l'habitude de jouer à DT en temps limité, ce qui peut provoquer des erreurs et éviter des parties trop longues), je n’ai rien contre le fun sauf lorsque cela se ressent au niveau du coût du jeu.
Il y a également une version solo dans cette boîte, mais je n'y ai pas joué et ne compte pas y jouer: je n'aime pas les jeux de société en solo. Toutefois j'ai entendu dire par des joueurs, fans comme moi, que la version de DT2 solo était très bien faite.
Donc en conclusion et en tant que joueur fan de DT, je dirais que cette extension offre un rapport qualité/prix moindre que les autres puisque c'est plus cher pour des choses qui ne sont pas utiles à mes yeux (figurines, version solo) et je n’ai seulement que cinq nouveaux personnages au lieu de huit. Toutefois, je l'achèterai car je reste fan et même ainsi je trouve que ça vaut tout de même le coup.
Le prêtre plus communément appelé La Croix Rouge
Maintenant je vais essayer de me mettre à la place d'un nouveau joueur, puisque cette extension est également un « stand-alone » pouvant être joué sans la boîte de base de la V1, tout en étant censée attirer de nouveaux joueurs.
Je pense que les figurines peuvent rendre le jeu plus attractif mais que pour les nouveaux joueurs elles peuvent aussi rendre le jeu moins pratique à manipuler (surtout avec les objets ou blessés sous les figurines, sans parler des salles à tourner). Concernant le livret de scénarios évolutifs pour initier de nouveaux joueurs, je ne suis pas très convaincu. A part peut-être pour des personnes n'ayant vraiment pas l'habitude des jeux de société, je pense que les règles complètes sont assimilables dès la première partie.
Concernant le contenu de cette V2, je pense que c'est beaucoup moins « noob friendly » que la boîte de base de la V1: les personnages et les salles sont plus techniques, plus difficiles à maîtriser. Pour les joueurs comme moi qui connaissent le jeu c'est mieux, mais pour les petits nouveaux cela doit être plus difficile. De plus, il était plus facile dans la V1 de gagner en pratiquant le « run », c'est à dire baser sa stratégie sur les sorties du labyrinthe de ses personnages au détriment des combats ; mais dans Prison, c'est à oublier tout de suite ! Pas de trésor ni de gobelin pour marquer 2PV d'un seul coup en sortie. Les personnages sont globalement plus lents et évoluent dans des salles beaucoup plus « fermées » imposant une bonne maîtrise de la rotation des tuiles. Or, pour les débutants la stratégie reposant sur les combats s’avère plus difficile à adopter que la course vers la sortie.
Concernant les nouveaux joueurs, je pense donc que DT n'est adapté que sur la forme: figurines attractives et tutorial dont je ne suis pas sûr de l'utilité. Mais sur le fond, cette boîte est plus difficile à appréhender que celle de la V1. Toutefois, je pense qu'il est également tout à fait possible de se mettre à DT en commençant avec la V2. Pour les fans: c'est toujours aussi bien, une extension à posséder, comme les autres. »
La conclusion de Benoît F. à propos du Jeu de société : Dungeon Twister 2 - Prison [2009]
Dungeon Twister Prison semble présenter les mêmes défauts et qualités que son aîné : le jeu possède une très bonne mécanique, sa richesse tactique paraît immense mais son ergonomie connaît quelques déboires. Les fans de la série, adeptes du « triturage » de l’intellect, seront ravis par Dungeon Twister Prison et y trouveront de nouvelles possibilités tactiques ; les autres, plus réfractaires aux calculs d’apothicaire, auront tout de même l’occasion de se lancer dans l’aventure grâce à l’approche didactique proposée par cette nouvelle édition.
On a aimé
- De belles figurines
- L’approche initiatique
- Une version solo remarquable
- Une durée de vie énorme
On a moins bien aimé
- Soucis de lisibilité
- La manipulation délicate des salles
- Très calculatoire (ce qui n’est pas un défaut pour tout le monde)
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