Critique Les larmes d'Isis #1 [2005]

En pleine Egypte mythologique, le temple d'Isis déborde d'activité. Pour les fêtes du Jubilé, le Pharaon veut se rendre dans cette cité aux milles merveilles. Les danseuses sacrées veulent alors lui offrir un spectacle à la hauteur de son rang et Ishanti redouble d'efforts pour devenir la meilleure et être remarquée. Mais c'est sans compter sur les Dieux qui cherchent à assouvir de sombres desseins qui pourraient bien gâcher les festivités.
L'album d'Ishanti est un ravissement pour les sens et ce, dès la couverture. C'est une des plus belles BD qu'il m'ait été donné de voir tant par la finesse des crayonnés de Crisse que par la mise en couleurs et en relief de Besson qui arrive à donner du volume à de simples feuilles de papier. Ce qu'on nous promet en couverture se retrouve ensuite tout au long des 48 pages. Nous pouvons alors littéralement contempler ces planches dont la mise en page n'a d'ailleurs rien à envier aux dessins comme le prouvent la page 13 et les double pages 24-25 et 42-43. C'est du grand art, maîtrisé techniquement à la perfection et on comprend parfaitement l'utilisation indispensable de la colorisation informatique, et notamment de Photoshop. Frédéric Besson a d'ailleurs déclaré qu'il étudiait l'éclairage de chaque crayonné de Crisse et ses aplats de couleurs pour ensuite coloriser finement le tout par ordinateur, opération qui lui prend encviron 10 heures par planche. Un sacré travail pour une danseuse sacrée. L'impression est elle aussi de qualité et permet l'expression des nombreux dégradés des dessins, le tout sur un papier glacé à fin grammage. Bref, vous l'aurez compris, cette BD est un superbe album.
Le point noir n'est cependant pas dans la technique mais tout simplement dans l'histoire et le sujet. Les courbes d'Ishanti et des ses amies danseuses sont certes intéressantes mais il faut avouer que suivre l'intrigue autour d'une jeune ado danseuse n'est pas des plus passionnants. Tenant un discours qui touchera plutôt les jeunes, cette BD passionnera beaucoup moins les vieux briscards du genre qui auront vite marre des situations enfantines et recherchent plus de profondeur et de duplicité dans les personnages. Ishanti est par exemple un peu trop gentillette alors qu'elle se fait mépriser par ses pestes d'amies, une situation un peu trop proche de Princesse Sarah pour plaire aux adultes. Autre exemple, son petit ami Tyi, un peu coquin l'embrasse à peine, et encore c'est platonique. On pense bien qu'un peu plus grand - voir dès à présent - il aura d'autres idées derrière la tête.
Ne tombons pas non plus dans l'effet inverse en disant que le scénario et les personnages ne sont pas bon; Crisse atteint son public et aura juste du mal à viser plus loin. C'est donc déjà en soi une réussite, et peut être que le tome 2 se fera le challenge d'attirer un public plus large. En attendant, les dessins sont de toute beauté et feront sûrement des jaloux dans le milieu.