L'Oracle Jeanne A. Debats répond à nos questions sur sa novélisation des Chroniques de la Lune Noire
L'Oracle Jeanne A. Debats révèle quelques secrets dont les prochaines dates de parution
« De Gueules » est la novélisation des 3 premiers tomes des BD de la saga Les Chroniques de la Lune Noire de François Marcel-Froideval par les éditions Léha.
On découvre le début des aventures du jeune demi-elfe sans nom à l’épée flamboyante qui sera baptisé Wismerhill par « Pile-ou-Face », un elfe voleur espiègle, lors de leur rencontre fortuite. Tous deux et leurs amis se retrouvent emportés dans une intrigue de luttes entre des Dieux qui les dépasse.
Le cadre de la saga est habilement posé. Le texte riche est ponctué de dialogues qui donnent vie aux héros. Il est parfois grossier, fait inhabituel chez Jeanne-A Debats dont on sent qu’elle s’en est délectée. Cette novélisation est addictive. Lisez notre critique de ce premier tome prometteur par ici. On a hâte de lire la suite des aventures épiques du jeune Wismerhill, tracées ou du moins cahotées et influencées par les Dieux, qu’on souhaite toute aussi immersive et dont les dates de parutions sont données dans l'interview ci-dessous.
Jeanne-A Debats est professeur de Latin et de français mais aussi autrice de romans jeunesse et adultes, novelliste, ou encore anthologiste de science-fiction. Elle a reçu de nombreux prix littéraires : Grand prix de l’Imaginaire, des prix Julia Verlanger, Bob Morane, Sésame et Prix Européen Jeunesse des Pays de la Loire. Membre artistique du festivales des Utopiales. Jeanne-A Debats s’investit dans de nombreux domaines pour promouvoir la littérature de l’Imaginaire.
Nurthor pour SFU (SFU) : Bonjour Jeanne-A, Merci de te présenter pour nos lectrices/lecteurs qui ne te connaîtraient pas et une explication (si tu veux) de ton prénom qui est à lui seul original.
Jeanne A. Debats (JD) : C’est presque mon vrai nom. Lorsque j’ai commencé ma carrière, je ne tenais pas à être identifiée autrice par mes élèves, je trouve que c’est déontologiquement compliqué de mêler mes deux vies. Contrairement à ce qui se dit beaucoup en ce moment dans les médias, comme la plupart de mes collègues, je ne tiens pas à laver le cerveau de mes élèves avec mon islamo-wokisme néoféministe et mes ouvrages reflètent ma conception du monde sans filtre si ce n’est celui de la fiction. Et c’est tout ce que vous saurez ;)
SFU : Quelle est ta formation ? Parviens-tu à vivre de ta plume, si non quel est ton « vrai » métier ?
JD : J’ai une formation en psychologie clinique et en lettres. Je pourrais vivre (mal) de ma plume mais mon autre métier (j’en ai DEUX VRAIS, même trois, car directrice artistique c’est un métier aussi ^^) c’est professeure. J’ai commencé par ça.
SFU : Depuis quand écris-tu et quel fut ton premier roman ou nouvelle ?
JD : J’écris depuis l’an 2000. Ça a commencé par hasard, j’avais une amie malade (morte depuis hélas) qui faisait sa première crise d’agoraphobie (mais une violente, à ne pas pouvoir sortir pour acheter du pain). Comme on se parlait tous les jours au téléphone, qu’au bout d’un moment les ragots sur nos mecs ça s’épuise, je me suis mise à lui raconter une histoire – jamais publiée – avec de grands espaces et des foules immenses, (et c’était de la fantasy façon Wismerhill, tiens maintenant que j’y pense) tout ce qui lui faisait peur dans la vraie vie. Elle m’a dit avant sa mort que cela l’avait aidée à ressortir. C’est là que j’ai compris le pouvoir thérapeutique (entre autres) de la fiction parce que moi aussi, ça m’avait soignée d’un certain nombre de choses (que je ne raconterai pas parce que je ne suis pas morte).
SFU : Peux-tu nous présenter, en quelques lignes ce projet un peu fou de novéliser la saga BD des Chroniques de la Lune Noire ?
JD : Il s’agit de romancer la première série de La Lune Noire, creuser les personnages, les motivations, expliciter les stratégies, raconter l’histoire autrement.
SFU : Comment es-tu venue à participer à ce projet des éditions Léha ? Est-ce ton idée de novéliser cette saga ? La connaissais-tu, cette saga ?
JD : J’avais déjà un contrat en cours chez Léha, mais je ne parvenais pas à l’honorer, bloquée dans l’écriture par la mort de ma mère. Froideval qui était mon directeur de publication me téléphonait souvent pour me soutenir et m’aider à reprendre et à me reprendre. C’est lui qui m’a parlé du projet, le premier, pas pour me le proposer mais pour regretter qu’il ne se fasse pas. Je lui ai déclaré un peu hardiment que ça ne devait pas être si difficile que ça, vu qu’il n’y avait qu’à se baisser pour ramasser le scénario (croyais-je, naïve que j’étais). Il m’a dit chiche !
Je connaissais la série bien sûr ! Bien qu’à l’époque, je ne l’ai pas lue au-delà de la première série (celle que j’adapte).
SFU : Pourquoi TOI, Jeanne–A Debats, t'es tu lancé dans cette histoire à des années lumières de ce que tu fais habituellement ?
JD : Tout d’abord, depuis que j’écris, j’avais comme projet de me frotter à tous les genres que j’aimais, ce que mon vampire Navarre m’a largement permis de faire.
Et en fait, j’ai toujours bien aimé la fantasy, deux de mes BD préférées étaient Mathai Dor et Thorgal, et en bouquin le Cycle de Corum et Cycle d'Elric le Nécromancien de Michael Moorcock, mes grands chouchous. Wismerhill leur ressemble beaucoup. Je suis arrivée trop tard pour écrire de la Sword & Sorcery ou de la Dark Fantasy, les Chroniques de la Lune Noire m’offrent l’occasion de jouer avec le genre avec ses qualités et ses défauts, j’adore.
SFU : As-tu rencontré François Marcel-Froideval l’auteur et scénariste des BD ? Comment se sont passé vos premiers contacts ?
JD : J’ai rencontré François en 2008 aux Utopiales, nous sommes copains depuis. Je me souviendrai toujours de ma première rencontre avec lui. Je venais d’avoir les prix pour la Vieille anglaise, la novella qui m’a fait connaître et il a appris le montant de mon à-valoir . Il était très petit, Griffe d’Encre la maison d’édition était toute jeune. Et lui « Mais tu es folle ! Je ne travaille jamais à moins de (Insérez ici un montant à 4 chiffres) ». Il y avait avec nous un certain nombre d’auteurs et d’autrices de romans, on a tous éclaté de rire. François vivait dans un autre monde que nous.
SFU : Peux-tu nous dire comment tu as travaillé sur ce projet ? Notamment avec François Marcela-Froideval ? Repasse-t-il tous tes textes au peigne fin, demande-t-il beaucoup de modifications… ou pas ? As-tu dû relire toutes les BD de la saga ?
JD : J’écris le premier jet, François repasse dessus et me donne des indications pour la suite. Si j’ai une idée, une question, on en parle et on décide ensemble. Il n’y a pas une phrase, un mot, une image dans De Gueules qui n’ait été validé par François. Bien sûr, j’ai tout relu d’abord (et je continue à relire au fil du travail).
SFU : La saga des Chroniques de la Lune Noire est inspirée des aventures jouées par François Marcela-Froideval en jeu de rôle. François t’a-t-il révélé des « secrets » ou des passages qu’il n’a pas pu porter en BD pour enrichir tes textes ?
JD : OUI.
SFU : Tu nous laisse comme ça sur un simple et gros OUI ? On veut savoir quels sont ces secrets !!! S’il te plaît !! S’il te plaît, si tu peux nous en parler.
JD : Eh ben non, évidemment je ne peux pas !
SFU : Hâte de te rencontre en IRL, comme disent les d’jeuns, pour te tirer les vers du nez !
JD : Je serai une tombe (rires) ! Tu n'as jamais été menacé de mort par François toi (rires) !
SFU : Avais-tu carte blanche pour novéliser cette saga ou au contraire on t’a délimité des bornes à ne pas franchir ? Si bornes, il y a eu, qu’elles étaient-elles, ces bornes ?
JD : François voulait une adaptation fidèle sinon à la lettre (quoique) mais surtout à l’esprit. Voilà les bornes. Perso, ça me va très bien, j’ai tous les plaisirs de l’écriture sans l’enjeu personnel qui me bloquait jusque là.
J’ai l’impression que je ferais un bon ghostwriter, vu que me glisser dans les pantoufles de quelqu’un ne me pose aucun problème et au contraire m’intéresse totalement. Se mettre à « penser comme François » c’est un exercice très fun en soi. La fois où il s’est demandé si tel passage se trouvait dans les Chroniques ou si je l’avais inventé a été pour moi un très grand compliment.
SFU : Écrire cette novélisation fut un projet difficile, long ou compliqué ? Es-tu plus tôt rapide ou lente pour écrire ? Écris-tu sur plusieurs livres et/ou autres projets de front ?
JD : Je suis incapable de faire deux livres à la fois. Quand je suis en phase d’écriture ça va vite, ce qui ralentit ce sont les périodes de creux où je n’écris pas du tout.
SFU : On a l’impression à te lire que tu t’es « lâchée » et fait plaisir ? Notamment sur les dialogues qui sont, comme leur personnage, parfois grossiers. On lit ici une Jeanne Debats que l’on ne connaissait pas ! « De gueules » fut-elle une « catharsis » pour toi, dans le sens d’être libérée de ton carcan de romancière « sérieuse » ?
JD : Je suis une romancière sérieuse qui parfois fait dire des choses peu sérieuses à ses personnages (on a reproché une fois à un de mes romans jeunesse que les ados qui composaient le gang ne parlent pas exactement comme des agrégés de Lettres classiques, critique que je trouve totalement stupide : les personnages parlent d’où ils sont. ) Mon vampire Navarre, sale gosse immature après 400 ans, peut en sortir des salées également. Cela étant comme nous partageons cette vision des personnages François et moi, c’était vraiment un plaisir de jouer avec.
SFU : Comment écris-tu sur un carnet, des feuilles volantes puis sur ordinateur ? Te réveilles-tu la nuit pour prendre des notes de tes idées ou alors sous la douche au réveil ou avant de se coucher ?
JD : Ordinateur. Je commence à écrire très tôt, genre 6/7 heures du mat pour finir à 10 h. Je ne note que dans un coin de mon crâne quand ça me vient.
SFU : Comment sera la suite de cette novélisation ? Vas-tu suivre l’ordre exact des BD ? Seras-tu l’unique autrice de la novélisation ?
JD : Normalement, il était prévu 3 volumes au départ pour la série complète, mais je pense qu’on s’achemine vers 4, il y a des évènements incompressibles qu’on ne peut pas faire passer en une ligne sans que ce soit frustrant. Et puis le pari est la fidélité de la transcription. Nous allons suivre l’ordre exact des tomes (mais pas forcément l’ordre exact à l’INTERIEUR des tomes). A priori, je serai l’AUTRE seule autrice (faut pas oublier François hein ?), sauf si je croise un 38 tonnes entretemps et qu’il ne freine pas.
SFU : Le rythme prévu est toujours avec un roman pour 3 tomes de BD ? A quelles dates sortiront les autres tomes de cette novélisation des Chroniques de la Lune Noire ?
JD : Trois BD sont bien adaptées, comme on fait environ 550 000 signes, et on ne peut pas toujours non plus couper à la fin pile d'un tome. Parce que ce qui se fait narrativement en BD, passe moins bien en roman. Donc on navigue entre ces deux paramètres, sachant que perso, j'aime bien les romans d'une taille moyenne pas les caleurs d'armoires normandes. Mêm s'il y a des gens très bien parmi les caleurs d'armoires normandes, même des que je relis tous les ans (rires).
La sortie du prochain tome 2 chez Léha est prévue en avril puis le troisième en octobre 2022.
SFU : On sent ton plaisir à novéliser la saga de Wismerhill, est-ce ton côté ludique qui ressort ? As-tu été une joueuse de jeux de rôles, joues-tu encore de nos jours ? Si oui es-tu Meneuse de Jeu ou plutôt joueuse et à quels JdRs as-tu joué ?
JD : : J’ai surtout été une joueuse frustrée. J’aurais adoré faire du jeu de rôle vraiment, j’en ai fait un peu mais ma génération n’accueillait pas bien les joueuses (c’est un euphémisme) De plus, les histoires leur laissaient peu de place ou de représentation. C’est un état qui change beaucoup en ce moment et j’en suis très heureuse pour les joueuses d’aujourd’hui mais c’est trop tard pour moi. J’ai toujours préféré jouer cela dit, je fais assez MdJ quand j’écris.
Sinon, j’ai fait quelques parties de D&D, In Nomine Satanis et & Magna Veritas. (pas de Cthulhu mode, ça m’a toujours gonflée alors que j’aime bien les textes – enfin je les aimais bien, mais les années ont passé et certaines choses m’en ont éloignée).
SFU : Quel(s) livre(s) et BD lis-tu actuellement ?
JD : en BD, j’ai lu le Goldorak de Bajram, Sentenac, Dorizon, Lacroix & consort, L'abolition le combat de Robert Badinter de Marie Gloris-Bardiaux-Vaiente & Malo Kerfriden et le dernier tome du Dernier Atlas. J’ai une pal en romans haute comme moi, mais je n’arrive pas à lire de romans en ce moment, je suis en phase d’écriture « profonde » (20 000 signes jours) dans ce cas là je ne peux pas lire. Je regarde plutôt des dramas historiques coréens sur le net.
SFU : Quels sont tes futurs projets d’écriture de romans en plus de la suite de la novélisation des Chroniques de la Lune Noire ? As-tu d’autre(s) projet(s) ?
JD : J’ai un projet de roman chez Léha qui sortira un jour, le fix up des nouvelles de Navarre Eschatologie du Vampire qui sort en avril 2022 et je vais enfin voir l’adaptation d’un texte qui m’est cher en BD (mais chut). En outre, j’ai aussi l’édition 2022 des Utopiales qui est une œuvre à part entière, même si collective et éphémère.
Merci Jeanne A. pour cette belle interview et tes éclairages sur De Gueules la novélisation de cette belle saga BD Les Chroniques de la Lune Noire qui peut être une bonne idée de cadeau en ces temps proche des fêtes de fin d’année et qui plaira beaucoup aux amatrices/amateurs d’épiques aventures fantastiques, connaissant les BD ou pas.
Publié le mardi 21 décembre 2021 à 09h00
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