Emmanuelle au 7ème ciel
Décès de la mythique Sylvia Kristel
Nous avons un bon argument pour pouvoir évoquer le décès de Sylvia Kristel sur Scifi-Universe : elle est l'héroïne du fascinant et onirique Alice ou la dernière fugue, un des rares films fantastiques de Claude Chabrol qui, dans ce qui est un de ses meilleurs films, offrait à l'actrice sulfureuse son meilleur rôle, entourée par Charles Vanel, André Dussollier et Jean Carmet. Une étrange relecture de Alice au pays des merveilles, dans laquelle Sylvia Kristel, toujours fantasmatique, se retrouve coincée dans une vaste et ancienne propriété au milieu de nulle part ; une force invisible l'empêche de partir. Sur un point de départ à la Quatrième Dimension, Claude Chabrol développe un envoutant voyage mental dont le twist était pour l'époque en avance sur son temps...
Mais c'est bien entendu le phénomène Emmanuelle (1974), film de tous les records et de toutes les passions, qui a fait de Sylvia Kristel une icône mondiale, un (sex)symbole de la libération sexuelle et une des héroïnes françaises les plus célèbres (alors que l'actrice est paradoxalement néerlandaise et que le personnage du livre est une eurasienne) au point d'avoir changé à jamais la connotation du prénom Emmanuelle. Dés lors, Sylvia sera prisonnière du personnage (qu'elle reprend plus ou moins dans les nombreuses suites officielles et officieuses, dont les téléfilms des années 90 avec ce pauvre George Lazenby) et du genre érotique (notamment la comédie érotique Leçons très particulières, très controversée à l'époque), qui la rattrape même dans des productions plus prestigieuses (drame, adaptation littéraire, film historique...). Elle apparait ainsi topless dans des films comme L'amant de Lady Chatterley (forcément), Le Cinquième Mousquetaire ou Mata Hari (et même le film de Chabrol). Sylvia Kristel assumait pleinement son statut et ses conséquences : « J’ai fait des films qui n’étaient pas très érotiques, mais ils n’ont pas marché. Mon public m’adore pour mon corps et s’il pense que je suis excitante, ça me fait plaisir. Et s’il se figure que je suis un sex-symbol, cela m’amuse puisque dans la vie je suis le contraire de ça. » (propos recueillis dans Plein feux sur Emmanuelle de Marc Godin)
Elle abandonne son personnage emblématique en 1993 avec Emmanuelle au 7ème ciel (triste présage) puis retourne en Hollande ou elle tourne dans quelques obscures productions locales, jusqu'à son retour en France en 2001 dans Sexy Boys, piètre tentative d'American Pie à la française dans lequel elle jouait une sexologue. Suivent un DTV inconnu intitulé Bank avec Daryl Hannah puis, 8 ans plus tard, une production franco-croate (Two Sunny Days) et un mélo italien en téléfilm (Les Demoiselles du Swing). La maladie l'empêche de tourner plus, puisqu'elle passe les années 2000 à lutter contre des cancers (l'un d'eux finira par nous l'enlever en ce jeudi 18 octobre 2012 à l'âge de 60 ans), après avoir été ruinée par un divorce puis être tombée dans la drogue et l'alcool suite à sa rupture avec l'acteur Ian McShane. Elle obtient aussi un certain succès en tant que peintre. Elle publie son autobiographie (Nue) en 2006, que l'éditeur Le Cherche Midi va réimprimer suite à la mort de l'actrice (le livre sera ainsi de nouveau disponible en librairie dés la fin du mois d'octobre).
Outre la saga des Emmanuelle, Sylvia Kristel aura tourné pour Jean-Pierre Mocky, Roger Vadim, Francis Girod (qui dira d'elle qu'elle « est un mélange surprenant entre Katharine Hepburn et Minnie, la compagne de Mickey ») ou Claude Chabrol, ainsi qu'avec son compatriote Rutger Hauer (dans Mysteries en 1978), Alain Delon (dans le nanar aérien Airport 80 Concorde en 1979), Ursula Andress (dans Les Monstresses et Le Cinquième Mousquetaire en 1979), Tony Curtis (dans le téléfilm The Million Dollar Face en 1981), Phoebe Cates (dans le teen movie Private School en 1983), Linda Blair (dans Red Heat en 1985, que les anciens addicts des vidéoclubs eighties connaissent bien), Vittorio Gassman (dans la comédie d'espionnage Le plus secret des agents secrets, écrite par Mel Brooks) ou Richard Chamberlain et Faye Dunaway (dans le téléfilm Casanova en 1987). Emmanuelle a paradoxalement autant propulsé Sylvia Kristel au rang d'icône que limité sa carrière. Mais Sylvia reconnait ne pas toujours avoir fait les bons choix. Elle refusa notamment de tourner dans le King Kong de John Guillermin : « C’est monsieur Dino de Laurentiis lui-même qui m’a téléphoné. A l’époque, j’avais signé pour René la Canne. J’ai également pensé que je préfèrais travailler avec Gérard Depardieu plutôt qu’avec un singe, mais je ne l’ai pas dit à De Laurentiis. Quand je vois la filmographie de Jessica Lange, je me dis pourtant que King Kong aurait peut-être été un formidable tremplin pour ma carrière » (propos recueillis dans Plein feux sur Emmanuelle de Marc Godin)
Sylvia Kristel n'était pas qu'une actrice de films érotiques (nuance importante : elle n'a jamais fait dans le porno), c'était avant tout une actrice tout court, même nue. On pourrait même affirmer qu'elle était d'utilité publique (et elle serait d'accord avec ça : « Je ne compte plus le nombre de spectateurs qui m’ont assuré que j’avais été d’une grande aide dans leur vie sexuelle »), au-delà du souvenir ému qu'elle représente pour beaucoup de gens (même les non-cinéphiles). Rendons hommage à sa beauté naturelle et à sa carrière avec cette galerie de photos pour la plupart dénudées :
Quelques affiches nostalgiques issues de la filmographie de Sylvia Kristel :
Sylvia Kristel, c'est aussi d'inombrables couvertures de magazines, dont celles-ci :
Goodbye, Emmanuelle !
Publié le vendredi 19 octobre 2012 à 21h45
Fiches de l'encyclopédie de la SF en rapport avec l'article
-
Alice ou la dernière fugue
1 fiche
-
Sylvia Kristel
2 rôles
Commentaires sur l'article
Réagissez à cet article en postant votre commentaire ci-dessous.Seuls les membres SFU peuvent poster leur avis.
Créez votre Espace SFU en moins d'une minute pour ajouter votre avis (et bien plus). C'est simple et gratuit !
Alors n'hésitez plus et venez rejoindre la communauté de Scifi Universe !
-
-
Gné ?
St Anger, le 20 octobre 2012 23h46 -
-
merci pour les photos - en nombre limité ce qui en facilite le visionnage -qui font effectivement comprendre la perte subie par le cinéma fantastique...
pendragon, le 21 octobre 2012 09h50